MARCO EVARISTTI

“Un artiste doit être un visionnaire engagé, en avance sur son temps…”

C’est à l’occasion de son dernier coup d’éclat sur les cimes du Mont Blanc avec son projet Mont Rouge que nous avons choisi de vous parler du travail de l’enfant terrible de l’art Danois d’origine chilienne, Marco Evaristti.

Connu pour ses “happenings” et ses projets spectaculaires et provocants, c’est également au nom de la défense de l’environnement que l’artiste tente d’alerter le public sur les risques résultant de la pollution de notre planète.

Artiste engagé et impliqué sans compromission, il crée des oeuvres éphémères, provocatrices et terriblement efficaces pour interpeller et sensibiliser l’opinion publique.

Il y a quelques années ses actions étaient déjà très controversées notamment lorsqu’il invita des toxicomanes à peindre des tableaux avec de l’héroïne, de la cocaïne et du sang contaminé par le virus du Sida afin de réveiller les consciences et dénoncer la société qui traite les drogués comme des déchets.

Plus tard la presse et le monde réagissaient devant ses installations dans un musée Danois où il créait l’émoi en posant le spectateur face à son propre degré de cruauté (The Goldfish blender). Il mit des poissons rouges vivants dans des mixeurs branchés, invitant les gens face à leur conscience, leur libre arbitre, leur instinct, à déclencher ou non le bouton de la mort”.

Très sensibles aux aspects environnementaux c’est aux politiques et au public qu’il adresse un message, lorsqu’il initie à partir de 2004 un projet de trois expositions destinées à les alerter sur la dégradation de notre planète. Dès cette époque afin de protester contre les dépôts de déchets nucléaires abandonnés par les Etats-Unis près d’une base Américaine (The Ice Cub), il peint un iceberg en rouge vif au Groenland.

Plus récemment, l’artiste et son équipe ont fait parlé d’eux en tentant de transformer la montagne mythique du Mont-Blanc en «  Mont Rouge ». A l’origine Marco Evaristti projetait de teindre en rouge le sommet, sur 2500m2, avec un colorant à base de pulpe de fraise et de framboise afin de dénoncer la pollution par les touristes du Mont Blanc. Malheureusement il a dû renoncer à cette idée après avoir été interpellé par les gendarmes pour “mutilation de site naturel classé”.

Finalement, il proclamera symboliquement l’indépendance d’un Etat souverain au sommet du Mont-Blanc , le « Pink State « (Etat Rose), matérialisé par le déploiement de 250m2 de toile rose. Par cet acte, il a souhaité faire réfléchir la population sur la propriété de la nature.

Artiste atypique et déterminé à nous questionner sur le processus créatif, Marco Evaristti porte un regard critique sur le monde et n’a de cesse d’alerter le publique sur les dérives et les dangers de notre société. D’ailleurs, n’est-ce-pas toute l’es sens de l’art… nous faire réagir.

A l’occasion de ce numéro, Marco Evaristti a bien voulu nous accorder un peu de son temps en se prêtant au jeu de l’interview.

Comment choisissez-vous les lieux de vos projets ?

Marco Evaristti : Je suis très attentif sur l’endroit que je choisi. Il doit réunir au moins deux aspects : il doit être difficile à atteindre et il doit être soumis à des tensions territoriales.

Le premier aspect est lié à un sujet qui me préoccupe depuis plusieurs années, le mythe de Sisyphe. Dans la mythologie grecque Sisyphe fut condamné, pour avoir osé défier les dieux, à rouler éternellement une pierre jusqu’au sommet d’une colline et à la regarder redescendre avant même qu’elle ne parvienne au sommet.

En France, le grand penseur Albert Camus, a vu dans ce mythe ancien une image de notre existence, en décrivant l’action de faire inlassablement les mêmes choses jours après jours. A travers mes projets, j’essaie de casser ce schéma dans lequel je me trouve prisonnier. Quand je crée une oeuvre, je passe par des problèmes immenses et j’y mets beaucoup d’efforts.

Ensuite, comme la Pierre de Sisyphe, tout disparaît : L’Iceberg fond, la neige colorée disparaît et tout est à recommencer.

Le deuxième aspect concerne la question territoriale qui est au centre de mon travail. Je questionne la nature et je me demande pourquoi je ne pourrais pas la décorer ? je choisis un lieu qui a une âme et qui invite au questionnement.

Prenez par exemple le sommet de Mont Blanc. Regardez une carte italienne et une carte française vous verrez que la frontière n’est pas placée exactement au même endroit. Le sommet est tellement populaire (j’entends économiquement prospère) que les deux parties le revendiquent.

Quelles sont vos sources d’inspirations ?

Marco Evaristti : La litterature, les mythes anciens, la politique moderne. Le sexe, la mort !

Parlez nous de votre équipe ? Peut-on parler d’une oeuvre collective ?

Marco Evaristti : Oui ! je compte beaucoup sur mon équipe et inversement, mais je reste toujours à l’origine des projets dont je suis le premier responsable. Je travaille avec un photographe, avec qui je passe beaucoup de temps et qui me comprend bien maintenant. Nous sommes constament en relation que je soit sur terre ou dans les airs.

Que vous inspire le thème Pollution ?

Marco Evaristti : Et bien, c’est un thème qui est au centre du Double standard d’Albert Camus ! nous parlons tous de la protection de l’environnement et en même temps, moi le premier, nous laissons les lumières allumées, nous conduisons des voitures, nous gaspillons l’eau.

Par mes travaux je souhaite attirer l’attention sur des choses dont vous n’auriez pas eu conscience auparavant. Pour moi, les Doubles standards prennent tout leur sens lorsque je suis accusé de détruire la nature en utilisant mes produits bio-dégradables à base de fruits colorés. Cette réaction est bonne mais très mal appropriée.

A votre niveau, faîtes ce que vous pouvez pour attirer l’attention sur la protection de l’environnement et demandez aux responsables politiques d’en faire autant. Cela serait constructif et pourrait peut-être même à terme être une solution.

Pour tout contact

www.evaristti.com – Malou Erritzoe – malou@evaristti.com – +45 21 48 30 26

Galerie Wofsen -Tiendeladen 6 – Dk-9000 Aalborg – Denmark – www.galeriewolfsen.dk – +45 98 13 75 66